Fuente Ovejuna, Lope de Vega
Coucou mes lecteurs ! Aujourd'hui nous nous retrouvons pour un nouvel article : ma note de lecture sur la pièce de théâtre Fuente Ovejuna, écrite par le grand dramaturge espagnol Lope de Vega. Bien que lue en espagnol, je vous fais parvenir ici ma chronique en français !
Achevée en 1619, Fuente Ovejuna est un chef d'œuvre du majestueux Lope de Vega écrite pendant le Siècle d'Or espagnol, période de rayonnement culturel. En effet, cette œuvre représente un véritable héritage emblématique de l'époque baroque créant une réelle modernité, tant sur le fond que sur la forme (comme c'est d'ailleurs le cas pour toute la comédie lopesque).
Bordés par une métrique fabuleuse, nous voici plongés au cœur du XVème siècle à l'époque de la Guerre de Succession au trône de Castille entre Isabelle la Catholique et Juana la Beltraneja, dans un village appartenant à l'Ordre de Calatrava nommé Fuenteovejuna dirigé par le Commandeur Fernand Gómez de Guzmán (véritable tyran abusant de son pouvoir pour maltraiter ses vassaux ainsi que les femmes). Bien que complexe, Fuente Ovejuna répond à un réel désir de création artistique nouvelle et moderne, comme Lope de Vega le suggère dans l'Art nouveau de faire des Comedias. En rompant avec toutes les règles du théâtre classique, il nous offre une véritable révolution poétique et iconographique grâce à laquelle sont véhiculées deux émotions chez le spectateur (ou lecteur) : grâce à l'écriture poétique baroque du texte (utilisation de nombreuses figures de style : métaphores, antithèses, etc.), une émotion verbale accompagnée d'une émotion visuelle, véhiculée par toute la théâtralisation qui, avec vivacité vient donner vie aux paroles pour les rendre plus percutantes et raisonnantes chez le lecteur et spectateur. En effet, la parole est ici une arme de revendication, tant pour dénoncer l'abus de pouvoir et la corruption que pour dénoncer les mauvais traitements de certains hommes (les plus influents) envers les femmes, qu'ils chassent, animalisent comme des brebis et dont ils abusent sans scrupule.
Cette dichotomie qui anime la pièce entre le Commandeur, représentant du pouvoir, et les vassaux est d'autant plus intéressant qu'il nous permet de découvrir là où se trouve la véritable noblesse, celle qui demeure dans l'esprit, dans l'âme et non dans le statut social. Véritable Beatus Ille. L'honneur du peuple, protagoniste de la Comédie du Siècle d'Or, triomphe sur le déshonneur du seigneur corrompu. On pourrait même aller jusqu'à parler d'illégitimité de la hiérarchie qui, ici, perd toute sa crédibilité. C'est alors que Fernand Gómez de Guzmán tente d'abuser de son pouvoir et kidnappe la belle Laurencia, le jour de son mariage avec son cher et tendre Frondoso, vaillant paysan. Cependant, il voit son plan tomber à l'eau puisque Laurencia parvint à s'échapper. Et oui, dans cette œuvre, le courage se traduit également par la femme (le monologue de Laurencia est selon moi formidable, vous devez absolument le lire). Là est la grande modernité de l'œuvre : la figure féminine. Ici, et surtout au travers de Laurencia, la femme est le vecteur du conflit, le pilier de l'histoire. La beauté physique se mêle à la beauté intérieure du personnage plein d'audace et de courage pour constituer une vraie féminité, mais également pour faire naître chez les femmes de l'époque un désir nouveau d'indépendance et de liberté. La femme apparaît ici plus courageuse que n'importe quel autre personnage, bien loin de la couardise.
Œuvre clairement avant-gardiste, Lope de Vega place les femmes au cœur de son œuvre, leur offrant la beauté, l'audace et le pouvoir entre leurs mains mais met en avant également l'honneur du peuple tentant de renverser un pouvoir seigneurial, en quête d'un régime féodal idéal, qui serait en réalité antiféodal. Personnellement, j'ai beaucoup aimé cette œuvre qui se lit assez vite, tout comme d'autres Obras de comendadores ! Ce sont des œuvres qui soulèvent des problématiques toujours actuelles bien des siècles plus tard et qui sont pour moi de vrais classiques !
Et vous, avez-vous déjà lu une œuvre de Lope de Vega ? Aimeriez-vous en lire une ? Aimez-vous le théâtre ? En attendant une prochaine chronique, je vous souhaite une bonne lecture !